Solidarité internationale et luttes sociales en Afrique subsaharienne |
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Rapport de la Ligue Djiboutienne des Droits Humains 15 avril 2006 - http://www.lddh-djibouti.org/ Ce bref rapport, qui se réfère aux recueils des communiqués, notes d’informations, diffusions d’Informations et textes de lois, n’a pas d’autre ambition que d’offrir une simple photographie de la situation des droits de l’Homme à Djibouti. Avant-propos Il nous semble utile de rappeler que Djibouti est indépendante depuis le 27 juin 1977. Sa superficie est de 23 000 Km carrés. Sa population est estimée faute de recensement officiel crédible à environ à 700 000 h. Elle est peuplée d’Afars qui occupent de tous temps et exclusivement 80% du territoire, de Somalis (capitale, Ali-Sabieh, et chef lieu de Dikhil) et d’Arabes, européens et autres essentiellement dans la capitale. Son port contrôle le passage entre le canal de suez, la mer rouge et l’Océan indien et joue seul depuis 1998 (date de la fermeture du port Afar d’Assab par l’Erythrée) à ce jour le rôle vital de débouché vers l’Ethiopie, principale puissance militaire et commerciale (un marché de 70 millions d’habitants) de la région. Enfin elle abrite depuis l’indépendance la plus importante base militaire Française d’outre-mer et depuis 2002, une base militaire U.S et un fort contingent(européen) de l’OTAN, officiellement dans le cadre de la coalition internationale contre le terrorisme. Note liminaire La défense des droits de l’Homme n’est chose aisée nulle part mais relève ici du parcours du combattant. Créée le 9/5/99 en vertu de la loi française de 1901 en vigueur à Djibouti au plus fort du conflit civil qui a déchiré le pays de novembre 1991 à février 2000 et d’une guerre qui opposait les deux puissances régionales voisines (Ethiopie et Erythrée), la LDDH a dû batailler ferme pour s’imposer sur l’échiquier des ONG nationales pour ne se voir reconnaître une existence officielle par le Ministre de l’Intérieur qu’en février 2003. La LDDH n’a pas chômé pour autant durant cette période : d’abord en luttant légalement pour sa reconnaissance officielle, (plainte restée sans suite déposée contre le ministère de l’intérieur auprès du tribunal du contentieux administratif) et surtout en s’attelant immédiatement à sa mission de défense des droits naturels. Ce qui lui a valu beaucoup de déboires et d’intimidations de la part du pouvoir et de ses sbires (explosion d’une grenade contre le siège de la LDDH le 22 mai 1999, juste après le passage de l’Observatoire des Prisons et de la FIDH de Bruxelles.). En vain ! Depuis sa reconnaissance au plan International en 2000, la LDDH est membre de la FIDH, de l’UIDH, l’EHAHRDN, et correspondant d’Amnesty International à Djibouti ; malgré son jeune âge son dynamisme lui a valu la vice-présidence de l’UIDH chargée de la corne de l’Afrique. La LDDH a le titre d’Observateur à la CADHP. Ce bref rapport, qui se réfère aux recueils des communiqués, notes d’informations, diffusions d’Informations et textes de lois, n’a pas d’autre ambition que d’offrir une simple photographie de la situation des droits de l’Homme à Djibouti. I) Démocratie et Droits PolitiquesIci comme ailleurs il est illusoire de prétendre au développement économique en restant politiquement sous-développé. Après une dictature de parti unique(1981/1992), une décennie de quadripartisme (1992/2002) et une interminable et ravageuse guerre civile dans un si petit pays (nov1991-fév2000), l’Accord de Paix Définitive du 12 mai 2001 a inauguré l’ère du multipartisme intégral. Convaincue que la conquête des droits politiques détermine le développement économique, la LDDH a été la première à se réjouir de cet Accord à la signature solennelle duquel elle a été conviée comme témoin par les deux parties au palais du peuple. 1.1 Accord de Paix du 12 mai 2001 La joie de la LDDH a été de courte durée. En dehors du « bûcher de la Paix » (décision unilatérale du FRUD-ARME de brûler son arsenal), de l’intégration de 300 combattants dans les différents corps d’armes par le seul gouvernement sans concertation avec l’autre partie et un multipartisme qui reste de façade comme le prouve la mainmise sur tout l’appareil étatique du parti au pouvoir à l’issue de trois consultations électorales au 1er avril 2006, il ne subsiste plus rien de cet Accord. Violé par la partie gouvernementale dès le lendemain de sa signature, il a été dénoncé par l’autre partie en sept 2005. Ce que la LDDH a déploré d’abord parce qu’englobant tous les aspects institutionnels d’une pacification durable du pays, il apportait des solutions satisfaisantes aux causes et conséquences du conflit ; ensuite parce que sa dénonciation constituait un retour implicite au statu quo ante conflit et la cause principale de la situation de ni guerre ni paix que nous vivons aujourd’hui. 1.2 Processus électoraux Sans parti pris, nous nous contenterons ici de citer les recours en annulation introduit auprès du conseil constitutionnel par l’opposition pour les Présidentielles 1999 et Législatives 2003. Nous laissons concernant le conseil constitutionnel le fin témoignage de son histoire à la parole officielle : " l’Histoire des contestations électorales atteste qu’il n’existe aucune jurisprudence où un recours par voie légale ait jamais été accueilli par l’auguste assemblée." Le régime ne peut souffrir aucun contre pouvoir.. Tout contradicteur politique et la population qui hasarderait un geste de soutien à l’un de ces subversifs sont victimes d’agissements répressifs, arbitraires et répétés. ». Dixit le ministre de la Justice chargé des droits de l’Homme de juillet 2001 à juin 2005, dans un ouvrage paru aux éditions l’Harmattan en.2002. Quant à la CENI, la LDDH a d’abord accepté l’invitation gouvernementale à y participer en 2003. Estimant que sa bonne foi a été abusée, elle s’en est aussitôt retirée en dénonçant la ventilation (restreinte) et le mode de désignation de ses membres (80% nommés à divers titres par le parti au pouvoir : président de la république, de l’assemblée nationale.) et le caractère très limité de ses attributions et compétences 1.3 Dysfonctionnements de la Justice Une semaine durant, des Etats généraux ont eu lieu sur ce sujet, sous le haut patronage et supervision du Chef de l’Etat fin 2000, leurs constats recommandations n’ont jusqu’à ce jour trouvé aucune application concrète : si bien qu’en début 2006 et d’une même voix la magistrature comme le barreau grincent des dents. Hérité de la France, le Tribunal du Contentieux Administratif (chargé de statuer sur les infractions de l’Etat contre ses Administrés) n’a pas siégé depuis 1996 malgré les innombrables saisines dont cette Juridiction a fait l’objet. Quant à la CCDB, qui a vu le jour après l’Accord de Paix Définitive, elle n’a rendu son premier rapport public, paru dans le Journal Officiel spécial n° 3, que .le 15 novembre 2004. Il faut le lui reconnaître, la CCDB a exécuté un travail de fourmi et son unique rapport public à ce jour est accablant :
Ses missions officielles ne se limitent malheureusement qu’à l’assistance et conseil au parlement, repertoriage d’irrégularités constatées et émission de recommandations aux malentendants qui exercent le pouvoir. Faute d’exercer les prérogatives juridictionnelles inhérentes à sa mission, elle est une coquille vide institutionnelle de plus. 1.4 Impunités L’enrichissement soudain et sans cause de certains oligarques et le caractère impuni de cette délinquance financière depuis son début au milieu des années 80 à ce jour constitue une incitation à la prédation des Deniers publics et des Biens Sociaux . Plus gravement, l’impunité des crimes de guerre qui révolte la LDDH, instaure un climat de violence qui risque fort de déboucher sur une violence tous azimuts. II) Droits économiques sociaux et culturels2.1. Le Syndicalisme Les travailleurs autrefois embrigadés au sein du syndicat unique UGTD (Union Générale des Travailleurs Djiboutiens) se sont organisés de manière nouvelle après 1992 à la faveur de la démocratisation partielle engagée sous la pression de la lutte armée. Dès 1995, des syndicats indépendants se sont illustrés par l’organisation de grèves générales. Le pouvoir a brutalement réagi licenciant dans la foulée des dirigeants de la centrale indépendante (UDT). Dans le même temps des dizaines d’enseignants membres du SYNESED ont été pour la plupart contraints à l’exil. Depuis les dirigeants de cette centrale n’ont toujours pas été réintégrés malgré les multiples accords internationaux en ce sens négociés avec le BIT et la CISL et en violation de l’Accord de Paix du 12 mai 2001 qui prévoyait cette normalisation de la situation syndicale. Pire, suite aux grèves du personnel du port en septembre 2005 avec plus de trente licenciements abusifs, la répression anti-syndicale s’est amplifiée débouchant en mars 2006 sur l’incarcération des dirigeants de l’UDT et le mépris vis-à-vis des pressions internationales menées par le BIT, la FIDH et la CISL. Conséquence : les dirigeants de l’UDT sont aujourd’hui en liberté surveillée. 2.2 Droits à l’Education et la Santé Aucun dispensaire ni école existants avant le conflit n’a été rouvert dans l’arrière-pays après le conflit. La gestion sociale post-conflit par le seul gouvernement est explicite sur ses intentions. - 2.3 Droits de la Femme Sous la pression des bailleurs de fonds qui ont eu en fait une exigence, le gouvernement a initié une théâtrale promotion des droits de la Femme : un ministère entièrement à part, une loi instaurant un quota de 10% à l’Assemblée nationale. Mais en coulisses, la réalité quotidienne de la Femme Djiboutienne est dramatique. De la fillette à la mère au foyer en passant par la femme active, cette prétendue promotion de ses droits est un arbre qui cache une forêt d’inégalités. Préfacée par une femme, Mme Mbaranga Gasarabwe Représentante Coordinatrice du système des Nations Unies jusqu’en 2004 est à ce sujet explicite : « la pauvreté reste généralisée à Djibouti, mais elle affecte davantage les femmes,. La principale raison qui explique cette situation est que l’initiative axée autour de l’égalité des sexes émane des bailleurs de Fonds et que pour l’instant l’appropriation nationale de cette initiative reste limitée. ». Le rapport conclue « les bonnes intentions gouvernementales ne se traduisent pas toujours par des actions. et sont contredites par la réalité » (RNDH 2004. PNUD). De la mortalité infantile à la mort en couches en passant par l’excision et l’infibulation, la Femme est la principale victime de l’absence de bonne gouvernance. La Femme souffre de la cherté de la vie (imposée), de la suppression des assistances publiques dans les services hospitaliers et qui affectent gravement la majorité des populations maintenue en asphyxie au seuil critique de la pauvreté. ConclusionsAu vu de ce qui précède, force est malheureusement de déplorer que la situation des droits de l’Homme s’aggrave de jour en jour dans notre pays. Conformément à sa mission de prévention des conflits, la LDDH souhaite, en apportant ce bref éclairage sur la régression des droits de l’Homme à Djibouti, alerter les opinions nationale et internationale. Puissent-elles de concert réagir à temps dans la mesure de leurs moyens pour sauver ce pays, son peuple et ses défenseurs démocrates. M. NOEL ABDI Jean-Paul Abréviations utilisées : FIDH : Fédération des ligues des Droits de l’Homme, UIDH : Union Interafricaine des Droits de l’Homme, EHAHRDN : Réseau des Défenseurs des Droits de l’Homme de l’Afrique de l’Est et de la Corne d’Afrique, CENI : Commission Electorale Nationale Indépendante, CCDB : Chambre des Comptes et de Discipline Budgétaire, EPIC : Etablissement Public à caractère Industriel et Commercial, UDT : Union Djiboutienne du Travail, SYNESED : Syndicat National des Enseignants du Second Degré, BIT : Bureau International du Travail, CISL : Confédération Internationale des Syndicats Libres. |
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