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Site(s) web :

Centre pour l’Environnement et le Développement :
Association Citoyenne de Défense des Intérets Collectifs (ACDIC) :
Ligue Camerounaise des Droits de l’Homme :
Réseau national des habitants du Cameroun - RNHC :
Eclairage critique du projet pétrolier Tchad-Cameroun :
Groupe de Recherches Alternatives et de Monitoring du projet Pétrole Tchad- Cameroun :
Journaliste En Danger - Afrique Centrale :


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Rapport préliminaire de la Mission d’observation de la Commission électorale citoyenne Indépendante (Ceci) pour l’élection présidentielle du 09 Octobre 2011 du Cameroun

9 octobre 2011


Conformément à sa mission, la Ceci, interface citoyenne mise en place pour parer au déficit de crédibilité d’Elections Cameroon, a déployé une importante mission d’observation dans le cadre de l’élection présidentielle du 09 Octobre 2011 au Cameroun. La mission d’observation de la Ceci a été conduite par Me Alice Nkom, Avocate au Barreau du Cameroun et coordinatrice Nationale de la Ceci, qu’accompagnait Mme Bechon Cyrille Rolande, Directrice Exécutive de Nouveaux Droits de l’Homme. Cette Mission était composée de 430 agents Ceci recrutés et formés depuis 2009 et issus de 93 organisations de la Société civile. Elle couvrait les Régions du Nord, de l’Ouest, du Nord-Ouest, du Littoral, du Centre, de l’Est et du Sud-Ouest. Elle a permis de visité 4706 bureaux de vote.

La mission a été précédée par une tournée de remise à niveau du dispositif d’observateurs engagés dans la Ceci.

Difficultés de base.

Au regard de la crédibilité de la Ceci et surtout de son refus d’allégeance au Pouvoir en place à Yaoundé, le Minatd (ministère de l’Administration territorial et de la Décentralisation) n’a pas voulu délivrer les accréditations aux observateurs de la Ceci.

Stratégie de contournement.

Lors de la formation des agents Ceci, et dans le but d’anticiper sur des éventuels problèmes de terrain, l’hypothèse de la non accréditation avait été prise en compte à travers l’introduction d’un module de formation sur l’Observation citoyenne. C’est ainsi que les agents Ceci ont été bien outillés pour conduire une observation crédible sans forcément avoir besoin d’arborer les badges de l’administration publique. Chaque agent Ceci est d’abord un électeur inscrit dans un bureau de vote précis. Il peut par conséquent observer le déroulement du scrutin dans son bureau de vote en exerçant son droit de vote et en produire un rapport complet et crédible.

De même, plusieurs observateurs Agents Ceci, membres d’autres organisations de la société civile, disposant d’un badge d’accréditation ont contribué à l’élaboration de ce rapport.

Activités de la mission

La mission a suivi la campagne électorale qui s’est déroulée du 24 septembre au 08 octobre 2011. Elle a eu plusieurs entretiens avec les responsables d’Elecam et particulièrement le président du Conseil électoral.

Ensuite, Les observateurs ont été déployés le 09 octobre dans les Régions suivantes : Nord, Ouest, Nord-Ouest, Sud-ouest, Centre, Littoral, Est. Ce déploiement a permis d’apprécier l’organisation, le déroulement, la régularité et la transparence du scrutin

Observations de la Mission

A- La campagne électorale

Elle s’est déroulée dans un climat de paix et de convivialité entre les différents acteurs conformément aux principes de liberté d’expression et d’égalité énoncés dans le code électoral. La couverture médiatique de la campagne électorale a été plurielle et équilibrée et s’est généralement déroulée dans le respect de la loi électorale malgré quelques frictions constatées entre les partisans de certains candidats.

Le Rdpc a mené une campagne d’envergure avec l’utilisation récurrente des ressources de l’État. En effet, on a noté par exemple une grave violation des dispositions des articles 66 et suivants de la loi sur l’élection présidentielle. Il s’agit notamment de l’envahissement de la ville par les affiches d’un candidat notamment M. Paul Biya.

On a aussi noté, pendant la campagne électorale, une quasi-confiscation des moyens humains, matériels et financiers de l’État par le Candidat du Rdpc, notamment l’utilisation des fonctionnaires et des voitures et autres moyens de transport de l’État.

Cette confiscation a été aussi très criarde pour ce qui est des médias d’État que sont la Cameroon Radio Télévision (Crtv radio et télé) et Cameroon Tribune. Bien qu’un texte du Ministère de la Communication affecte un temps équitable pour tous les candidats dans une émission spéciale créée pour l’élection présidentielle, la Crtv a accordé, au seul Rdpc, plus de 70% du temps réservé à la couverture de la Campagne électorale. Cette disproportion a aussi été observée dans la gestion de la Campagne par le quotidien National « Cameroon Tribune » :

Plusieurs leaders d’opinion n’ont pas pu tenir des réunions publiques pendant la période de la Campagne électorale. Par exemple les réunions publiques interdites par les autorités administratives de Yaoundé 2 et Yaoundé 5.

B- La période pré-scrutin

Les listes et les cartes électorales

Les jours précédents le scrutin ont été marqués par des faits inédits, notamment le transfert par Elecam d’une partie de ses prérogatives aux structures du Minatd que sont les Chefferies traditionnelles de 2ème et 3èmedegré. Or, ces chefferies traditionnelles sont pour la plupart tenues par les responsables du Parti au Pouvoir.

Dans la plupart de cas, les listes n’ont pas été affichées dans les délais prévus par la loi. Cette situation n’a pas permis aux électeurs qui avaient des contestations à les formuler au regard du temps très court pour le faire.

Le Conseil Electoral d’Elecam ne s’est pas démembré de manière à pouvoir connaitre des contestations préélectorales tel que prévu par la loi ; Les cartes d’électeurs, ayant été transmis aux Chefs de quartier, les électeurs ont eu beaucoup de peine à retrouver leur carte car ne sachant pas où se rendre.

De même, les bureaux de vote ont été installés dans les lieux qui ne permettaient pas dans la plupart des cas aux électeurs de se retrouver facilement sur le lieu où ils étaient appelés à effectuer leur devoir citoyen.

La sécurité

La veille du scrutin, le gouvernement du Cameroun a mis le pays sous haute sécurité, tout en insistant sur le fait qu’une menace pesait sur l’organisation du scrutin, et que les forces de l’ordre devaient être déployées partout de manière très soutenue. Cette situation a créé une psychose de peur au sein de la population qui s’est ruée dans les marchés et grandes surfaces pour les achats en redoutant des éventuels troubles le jour du scrutin ;

Appel à l’abstention

Quelques jours avant le scrutin, plusieurs leaders de la société Civile avaient appelé à l’abstention ou au vote nul. C’est le cas notamment de Hilaire Kamga de l’Offre Orange, de l’artiste Valsero qui coordonne le mouvement « les enfants de la révolution » et de l’artiste engagé Lapiro de Mbanga.

C- Le déroulement du scrutin

Le scrutin s’est déroulé le dimanche 09 octobre 2011 dans les bureaux de vote répartis sur le territoire national et quelques ambassades.

Il en ressort des constats des équipes d’observation de la Ceci ce qui suit :
- Les bureaux de vote ont dans la plupart des cas ouvert après 9 heures alors que la loi prévoit l’ouverture à 8 heures. Dans les villes de Yaoundé et surtout Douala, les responsables de plusieurs bureaux de vote ont eu de la peine à faire démarrer le scrutin. C’est le cas du Lycée technique d’Akwa où le bureau de vote a été ouvert à 11h à cause de l’absence du représentant d’Elecam ou même à l’Ecole Cebec Soboum Doualaoù jusqu’à 12h35, le vote n’avait pas encore débuté dans le bureau « A » en raison de l’absence du représentant d’Elecam. C’était la même situation à 13h, dans toute la zone de PK12 et plus précisément à l’école publique Pierre Bonot, à l’école publique de Bonamoutongo, à l’école Saint Félix ;
- Dans bien de cas Elecam avait cédé sa mission aux Chefs traditionnels sous la houlette du MINATD. C’est le cas à Douala 3ème où le sous-préfet en personne est arrivée à 13h 30 avec le matériel électoral à l’Ecole privée Achouka ;
- Dans certains cas, les bureaux de votes étaient placés dans des endroits inaccessibles pour les personnes handicapées. C’est le cas des bureaux situés à l’étage au Lycée Joss de Douala, à l’école publique de Nfandena 1 à Yaoundé et à l’école publique d’Etoudi.
- Le matériel électoral était insuffisant dans plusieurs localités au début du vote. Mais cette situation a été remédiée au cours de la journée.
- Le personnel électoral a fait preuve presque partout d’une faible maîtrise des procédures et de gestion des bureaux de vote ;
- Dans certains de bureaux de vote, les isoloirs étaient placés à côté de la fenêtre. C’est le cas par exemple des bureaux de vote du quartier Nkol Eton à Yaoundé ;
- Les listes électorales publiées comportaient dans beaucoup de cas des doublons, des triplons ou même des quadrillons. On a retrouvé même dans certaine listes les noms des personnes décédées depuis plusieurs années ;
- Dans la plupart des cas, les urnes n’étaient pas sécurisées. Certaines n’avaient pas de scellés et d’autres disposaient de 4 scellés, donnant ainsi la possibilité de l’ouvrir en journée et de refermer par la suite
- Certains citoyens ont eu plusieurs cartes d’électeurs alors que d’autres n’ont pas pu retrouver leurs cartes, leurs noms figurant quand même sur la liste ;
- D’autres électeurs ayant pourtant des cartes n’ont pas retrouvé leurs noms sur les listes ;
- Les représentants des candidats ont brillé par leur absence dans la majorité des bureaux de vote observés par la Ceci ; toutefois on déplore le fait que certains scrutateurs des partis politiques se sont vus renvoyer des bureaux de vote ;
- La présence des forces de l’ordre et de sécurité a été très visible sur l’ensemble du territoire, ce qui dans certains cas a constitué un dissuasif par rapport à certains électeurs ;
- L’inexistence d’encre indélébile a permis d’enregistrer dans plusieurs bureaux de votes des votes multiples, et a favorisé l’expression des charters électoraux ;
- L’achat de conscience des électeurs a été observé dans plusieurs localités du Cameroun.

Le dépouillement

Le dépouillement du vote et le décompte des voix a connu des fortunes diverses selon les localités. Dans certaines localités, notamment dans le Mungo, à Yaoundé, à Abong Mbang, les responsables des bureaux de votes ont décidé de procéder au dépouillement en secret en excluant du bureau de vote les électeurs. Cette situation a causé des tensions très graves comme l’on a pu l’observé au bureau de vote « stéphanois » à Obili Yaoundé et au bureau de vote VIP de Nkongsamba.

Dans certains bureaux de vote, le nombre de votants, associé au nombre d’abstention était très disproportionné par rapport au nombre de cartes d’électeurs non retirées disponibles au Bureau de vote. Par exemple au Bureau de vote de Nkoleton B, 381 votants contre 477 inscrits dont 96 abstentions. Pourtant 132 cartes d’électeurs non retirées devant ce bureau de vote.

Les fiches de dépouillement éditées par Elecam étaient inadaptées dès lors qu’il n’y avait pas d’espace pour noter les « Bulletins nuls ».

La mission Nationale d’observation de la Ceci a aussi noté
- Que la participation a été très faible dans la plupart des localités observées ;
- Qu’Elecam a transféré dans plusieurs localités ses prérogatives aux agents du Minatd et autres auxiliaires que sont les chefs de quartier,
- Une très faible maitrise de la loi électorale par les agents membres des commissions locales de votes ;
- L’existence de plusieurs bureaux de vote inconnus des citoyens électeurs ;
- Que les listes électorales n’ont pas été toilettées comme initialement annoncées, d’où l’existence sus ces listes des personnes décédées, des noms repris 3, 4, 5 fois et parfois plus ;
- L’inefficacité du logiciel utilisé pour la gestion du processus électoral ;
- Que cette journée du 09 octobre a été endeuillée. Deux électeurs ont été tués par les forces de l’ordre à Bandjoun et Kribi ;

Conclusion

La mission Nationale d’observation de la Ceci (La mission) félicite les autorités camerounaises et le peuple Camerounais pour leurs adhésions aux principes démocratiques.

Elle salue la maturité des acteurs politiques camerounais qui ont permis la tenue d’un scrutin dans un climat de paix malgré la suspicion ambiante ;

La mission note que la Direction générale d’Election Cameroon et ses démembrements, ont été incapables d’organiser une élection crédible.

La mission relève que la loi électorale camerounaise est encore très confuse et contient des dispositions sources de conflits.

La mission estime que le scrutin du 09 octobre 2011 a été certes libre, mais il n’a été ni juste, ni totalement transparent, encore moins équitable. Au regard des standards en vigueur en matière d’élection, la mission estime que cette élection n’a pas été véritablement démocratique du fait de la défaillance organisationnelle.

La mission exhorte tout de même les acteurs politiques de la République du Cameroun à respecter les résultats qui seront proclamés par les instances prévues à cet effet et à utiliser, le cas échéant, les voies légales de recours pour toute réclamation.

La mission recommande au gouvernement camerounais de mettre en place une commission d’enquête indépendante pour faire la lumière sur les cas de personnes tuées lors de ladite consultation électorale.

La mission recommande, avant l’organisation d’une prochaine consultation électorale, un audit général quadripartite du fichier électoral. Cet audit pour être crédible, devrait être l’aboutissement d’un processus consensuel impliquant les acteurs politiques, le Gouvernement, la société civile et Elecam.

La mission demande au Gouvernement camerounais de prendre les mesures nécessaires pour asseoir la crédibilité et l’efficacité de l’Organe de gestion des Elections (Oge) en vue de garantir l’organisation d’élections véritablement crédibles dans le futur.

La mission encourage tous les acteurs politiques camerounais, la société Civile, le Gouvernement et Elecam à créer un cadre de dialogue indispensable pour apaiser les tensions sociales et pour s’accorder sur le cadre juridique d’organisation de la dévolution du pouvoir en vue de la promotion de la démocratie et de l’état de droit, la paix et la stabilité pour la continuité du développement du pays.

La Commission électorale citoyenne Indépendante informe l’opinion qu’elle rendra public dans un délai maximum de 30 jours un rapport détaillé sur le déroulement global du scrutin au Cameroun.

Fait à Douala, le 09 octobre 2011

La Coordinatrice Nationale de Ceci, Me Alice Nkom





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